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jeudi 4 mai 2023

L’aphorisme et le poème

 


— Imagine, dis-je à ce vieil enfant, cet ami revu, retrouvé, imagine que tu reviennes de tes maux, de ces troubles et tristesses qui te faisaient vivre une épreuve si compliquée que les autres avec toi en souffraient, quand tu jouais devant et contre eux un rôle qui n’était ni toi ni le tien. Maintenant guéri, tu regardes mes pages qui te paraissent molles, fades, tu n’y sens pas les complexes ordres qui venaient du monde où tu évoluais jadis, mais… là vivent des lueurs et des pensées, des vérités encore, le temps va vers l’avant et se dépose dans ton être. Ici tu vois de la simplicité mais tu peux lire un paysage entier, plus vaste que ceux qui réduisaient tes conquêtes à des domaines clos, quand tu vivais par terre, du sol. Dans les contrées que tu abordes, voir et faire une halte t’est peu utile. Ta progression et ta cueillette auront du sens et du succès si tu sais te mouvoir en marchant seul parfois sur l’inconnu.


Ondées de printemps, poésie…

Albert Einstein, 1951.

Chacun sa langue !



La poésie artificielle


La poésie est un art difficile

J’ai beau y faire, une autre est plus subtile

Elle en reprend, j’ai l’air d’un demeuré 

La poésie est un art de taré


La poésie est un monde en sabots

Près des vaches, des sols, pas des robots

On est resté des humbles cultivés

Réveille-toi, nous sommes arrivés


La poésie est une artificielle

C’est chacun pour sa peau, la tienne est belle

Attendez-vous à perdre en société 

Brutal, factice, armé, l’art est dicté




Êtres privés de lumières

Cela commence par la honte

et la méchanceté des mères,

des pères, des enfants, il monte

un océan d’obscurité 

pour cacher la vulgarité

Êtres privés de la parole

privés d’enfance et de l’école




Discourtois


Ton discours, toi, c’est nul

C’est mon discours qu’a eu l’

assentiment des pairs

Le meilleur c’est mon père !

Être reçu, c’est long

Fais plus court, toi, sinon

ce serait différent 

du normal que je vends




mardi 4 avril 2023

Adresse (à des diseurs)

                                   



Maintenant sur terre,

Iels auront de quoi faire !

Voilà de tradition. Rayons,

et rions, de sentiments mêlés… (e muet !)


8:28




vendredi 18 novembre 2022

Du chien à l’aube

Œuf du 15 mars 2023, pour J. & A.
Signé David Rolland, avec Pixelmator.




Parfois, je pense que le Plouc de la méchanceté d’un cœur de pierre a heureusement trouvé sa Patrie dans une nation, celle d’un grand Pays, qui commence par l’F que l’on veut bien reprendre avec l’E de la R, l’Art de la Reconnaissance. 


mercredi 16 novembre 2022

Grande Cause Contre Viol

Grande Cause Contre Viol

Le « bâton du Berger » met du bon cœur à s’employer

Mon cher frère et mes sœurs d’opinion, je n’aime pas le saucisson

Qui dit je peux pas faire mieux pour l’Instant n’est qu’à noyer

Je fais tout pour l’instant qui fait de moi Président du Foyer

On n’a pas d’argument pour dire en vérité, on doit la faire

On doit la faire en la disant, en attendant son droit de plaire









partisan des FOURS



 

mardi 8 novembre 2022

LA VIE EST LA GRANDE CAUSE NATIONALE PERPÉTUELLE

 — LA VIE —

– GRANDE CAUSE NATIONALE PERPÉTUELLE –


L’X divorce, l’Y meurt. Pour l’X, c’est pire que l’Y. Sa condition X est le veuvage de la relation au relationnel. Or, toute mort est-elle un suicide ?



samedi 5 novembre 2022

De la haine du lecteur jusqu’à l’issue normale


La Liseuse, Jean-Honoré Fragonard, vers 1770.


Des poèmes dégoûtés


Quand on veut faire du neuf en littérature au mépris de ce qu’on veut juger dépassé, on veut non seulement assumer ses innovations mais surtout assumer de convertir les lecteurs à ses innovations, y compris en lecture. L’assentiment ne suffit pas, les chiffres des ventes non plus. Or rien de ce qui se lit ne peut se faire sans intelligence. Or on attend souvent en vain des pensées et des idées poétiques au sujet de la lecture, pas seulement adressées à l’abstrait lecteur que l’auteur imagine à l’autre bout de la page. Or le consumérisme fait flamber, entendez par là surfaire et se volatiliser, le cours de la valeur de la poésie actuelle. L’embourgeoisement guette les livres. La poésie et l’humanité, quand elles ne sont pas réduites à la honte dans des consciences qui sont nombreuses, sont victimes de persécutions, pour mieux dire d’un harcèlement mené, nécessairement avec conscience par des écrivains reconnus. Sinon, si l’inconscience les domine, ce n’est pas un dieu mais un démon qui peut nous sauver. Or il n’est plus question que ce soit la poésie qui le fasse : la poésie est une idée erronée qui peut, au mieux, devenir plus juste. Or il y a un bel avenir pour les erreurs en voie de réajustement, en renonçant à l’autorité morale des uns sur les autres, en délaissant le pouvoir qui prétexte que son savoir la rend décisive. 



De la poésie nouvelle


Logiquement, la poésie éprise d’innovation a la phobie de l’ancien, l’avant : c’est déjà beaucoup, c’est presque immense. Est-ce sa seule phobie, peut-être, mais corrélée à celle de l’autre, qui existe dans les poètes qui évoquent un peu trop l’avant, l’ancien, selon la poésie nouvelle. Schématiquement, à la beauté peut se substituer la laideur, au bien se substituer le mal, au vrai se substituer le faux, au bon se substituer le mauvais, à la logique se substituer l’illogique, l’arbitraire. Or sans la conversion du lecteur à apprécier la poésie nouvelle, pas en étant saisi de dégoût par de telles substitutions, mais en appréciant mieux, plus utilement et plus finement, agréablement, la nouvelle poésie que voilà, sans le lecteur nouveau, il ne reste rien d’autre à convoquer que l’économiste et la satire. On a vite choisi. La satire publique est sale. L’économiste, qui est poète, nous assure de la santé des comptes des éditions poétiques. Le lecteur est rassuré par son investissement. C’est la fin du lecteur. Un lecteur, ça se tait. Fermez-la. L’esprit, par contre, gueule sa douleur de condamné par la nouvelle poésie, qui substitue la haine de l’un à l’amour de l’autre. À ce stade, il peut refermer la majorité des livres, le mal dont on l’accable se charge de refermer pour lui ceux qu’il a aimé. Si des bonnes choses vinrent des livres, des mauvaises ont pu en sortir également, par la volonté de leurs auteurs. Le malheur, monsieur, madame, fut si vaste, que la question ne se pose plus : rien de bon, rien de mauvais, refermez ça et laissez la poésie nouvelle aux intrépides, aux immortels, aux plus avertis. Il y eut la haine de la raison, la haine de l’autre, la haine de l’étranger, la haine de l’humanité, la haine de la sagesse, la haine de la poésie, la haine du dialogue, la haine de l’amour. C’est le tour de la haine du lecteur, la haine de la minorité invisible, la haine personnellement et impersonnellement dirigée vers toi, vers moi qui t’écris, vers toi, qui me lis. Le dérèglement des sens, voulu et imposé par des fans incohérents de poésie classique et critique à des personnes violentées et affaiblies, se changea en handicap, psychiatrique et social. La poésie vivifie, l’esprit se soigne, du mal on peut guérir. Il en reste la haine des fous, la haine de la psychose. Pendant que l’on soignait ce dérèglement des sens, qui n’était pas antipoétique car jeunesse se fait, l’intérêt des autres s’est déplacé : changer la vie ne va pas sans sacrifices. Le lecteur déréglé est invité à changer la vie, pas avec des critiques et des remarques, jugées morbides depuis la réforme vitale qu’on a décidé. Il est prié de changer, car il ne s’intègre pas. La vie n’attend pas, qu’on n’attende pas de la vie plus que ce qu’elle peut donner. Ainsi va la vie nouvelle, il y en a de partout, il suffit de s’intégrer selon la poésie nouvelle, la raison nouvelle, l’autre nouvelle *1*, l’étrangère nouvelle, l’humanité nouvelle, la sagesse nouvelle, la dialogue nouvelle ~2~, l’amour nouvelle °3°. En avant ! La poésie tu seras. 


*1* Pourvu qu’elle soit bonne.

~2~ Anciennement appelée la conversation.

°3° Mais pas plurielle.


De la poésie pro-, qui ne se tait pas


Le développement précédent, si binaire que j’en demande pardon, est binaire comme le sont l’instant d’avant par rapport à l’instant d’après, celui qui suivra l’instant présent, qui est celui où nous sommes, où je suis. C’est l’instant du vivant, celui que nous aimons, l’instant qui sauve, ou qui en porte au moins toute la possibilité et souvent davantage. L’instant a été fait ainsi, il est de simple facture, mais solide, nous ne pouvons que l’honorer en le rendant aussi bon qu’il le promet. Le binaire qui succède à la perception trine de l’existence est parfois schématique, c’est un passage obligé quand on se propose d’examiner la logique de l’ancien et du nouveau, qui fait peu de cas de l’instant présent. La dialectique, que j’aborde ailleurs plus longuement, n’est pas nécessairement binaire, ni même paire, ni dans sa progression, ni dans ses prémisses, ni dans ses conclusions, malgré la nécessité d’en passer par le deux en allant de l’un jusqu’au trois. Mais il est probable que la dialectique marche sur deux jambes, comme la plupart des poètes, des philosophes, des passants et de mes amis, sans exclure les autres en mouvement, que leurs moyens soient impairs ou pairs. 


Les poèmes sont un exemple de ce qui rassemble des instants présents. L’explication à ce sujet, l’instant présent, a lieu dans l’appréciation du goût qu’ils proposent et l’avis de tout lecteur, ou témoin de leur lecture. Les critiques qui ressassent leur arbitraire leçon, leur refus du genre ancien au profit du genre nouveau, sont indélicates, déplacées en matière de goût, de style et d’éthique, lorsqu’il s’agit d’apprécier des poèmes. En poétique, la critique peut proposer, tantôt sur un mode constructif, tantôt sur un mode destructif, voire éruptif, ses vues nouvelles et ses souhaits, les enjeux de la poésie et la situation nouvelle. La critique médiatique repose sur un tact et une sincérité, que l’encensement circulaire et les louanges d’un milieu épuisent. De tels caprices d’initiés ne peuvent que conduire le lecteur à réduire, au mieux, ces critiques à des ironistes, au pire au renoncement, dont la lecture et l’esprit qui nous est commun souffrent, à commencer par la santé mentale des locuteurs de la francophonie. 


La réciprocité n’est pas une vilénie, mais une reconnaissance et une courtoisie. Un dialogue de sourds, au sens figuré, pose le problème du mal qui atteint la communication, qui n’est pas le problème du sens figuré rendant hommage au sens propre, comme si des figures de style et des métaphores hantaient la réalité des dialogues à tel point que les gens ne voudraient plus se parler communément, se comprendre, comme si c’était chacun sa langue, dont les réinventions vouaient les uns au succès, les autres à l’échec ; ou comme par compassion envers les sourds, qui peuvent lire et dialoguer par écrit, pourtant, tout comme ils peuvent dialoguer entre sourds en communiquant par le langage des signes, la gestuelle et l’expression du visage. Face à la surdité de l’esprit, hurler spirituellement ne sert à rien, mais la sagesse et la philosophie, la religion et la bonne volonté proposent des leçons qui s’appliquent tantôt à soi-même, tantôt à soi-même et à l’adresse des autres, tantôt qui sont consacrées à soi-même et tantôt consacrées à soi-même avec les autres, c’est là que l’esprit nous aide, à l’écouter et à l’entendre. 


La langue commune n’est pas la défaite de la poésie, plutôt sa condition première. La garder, ou la renier pour une autre à soi, ou combiner les deux, ou l’éprouver avec des difficultés qui feraient de toi et de moi des monstres, soumis au jugement des autres, ces possibilités sont fort différentes de la loterie, où les tickets sont soit gagnants, soit perdants. Le lecteur et le poète, celui qui écoute et celui qui parle, celui qui est chez lui et l’invité, celui qui peine et celui qui pratique couramment, rencontrent des milliers de sentiments variés, mais aucun qui soit moins fort et vrai, par la justesse et la bonté qu’il veut y mettre de bonne volonté, que la grande joie et la petite peine éphémère du gagnant et du perdant à la loterie. Quel qu’en soit le gros lot, bien qu’une somme d’argent puisse changer la vie d’un pauvre, je crois que personne de sincère n’échangerait sa chance en parole contre sa chance en argent, tout bien réfléchi. Tout bien réfléchi de mon côté, la justesse de la parole et sa liberté sont la mission de la poésie, qui peut aider bien des âmes de lecteurs à souffler, en maintenant la parole, en conservant sa mission, en transmettant sa liberté et en approfondissant sa justesse.





vendredi 16 septembre 2022

La Darwin




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La Darwin




Les Poètes sont des chasseurs de poissons

Allez, Poissons, évoluez sur la terre !

Perdez vos branchies, respirez le bon air !

Conformez-vous au taxon de l’opinion




Ou mourez ! Blacklistés ! À la liste noire

des critiques d’auteurs, poètes poiscailles !

Préférez instruits du post’, bien p’op’, sans failles,




Et toi là, viens dire tout ce que tu dois

à la révolution française, ou tais-toi !!!




Extension du domaine de la vertu !!!

Une nuit ? Deux mille à rêver !!!




Charles Baudelaire ! On veut ! Voir La Darwin !



Charles Baudelaire ! On veut ! Voir La Darwin !

Charles Baudelaire ! On veut ! Voir La Darwin !

Charles Baudelaire ! On veut ! Voir La Darwin !

Charles Baudelaire ! On veut ! Voir La Darwin !

Charles Baudelaire ! On veut ! Voir La Darwin !


lundi 27 septembre 2021

Pourquoi les fous

Nietzsche, Munch 



Pourquoi les fous sont-ils les vrais originaux ? 
Ceux qu’on appelle « fous » naissent deux ou trois fois
Le commun des mortels renaît aussi parfois
après un long tunnel, mais plus souvent là-haut

Les fous (entendez « fous tel qu’on aimerait l’être »)
Sont nés, comme beaucoup, à la maternité
Quand ils en ont assez, quand ils veulent renaître
ils vont à l’hôpital qu’ils louent à la nuitée 

Mais les fous vont plus loin ; lorsqu’ils rentrent chez eux
leur vie nouvelle est un miracle, ils sont au centre
Les fous, qui en ont vu assez, veulent renaître 

Après tout, c’est leur droit, « À soi-même son maître »
Tout le monde peut l’être, il suffit d’une idée 
ils vont à l’hôpital qu’ils louent à la nuitée 



jeudi 25 juin 2020

Un temps pour la grandeur

La Liberté éclairant le monde
New York




Il se pourrait que tout le drame de nos sociétés tienne en une erreur, et même en une phrase : nous voulons devenir plus forts trop tôt, avant de nous élever. Or, c’est le contraire qui serait bon. S’élever, puis seulement devenir plus forts, en vieillissant, comme les arbres. 

Une autre erreur, parente de la première, voudrait que nulle grandeur, nulle idée de hiérarchie, donc nulle élévation, ne soient permises. Mais là encore, il se pourrait bien que le but de l’éducation, la grandeur — puisqu’il ne s’agit pas de jouer des coudes ni d’assécher son voisin et de dicter sa loi aux autres —, soit d’amener les êtres à s’élever selon l’esprit, avec intelligence, à gravir l’échelle des valeurs. 

Tel l’arbre qui admire le ciel, le soleil, les étoiles ou les nuages, sans jamais ployer, accueillant dans ses branchages oiseaux, insectes, fleurs, et même poussières ; leur offrant un abri, un nid, un repas, la lumière, un promontoire où chanter ; ne devrions-nous pas aussi songer à notre élévation avant de prouver notre force ? 

mardi 14 mai 2019

Un temps pour tout

La tour — Tarot




Il y a, à l’œuvre dans la société, une horizontalisation des valeurs – propre à l’anarchisme –, qui montre – et qui entend bien montrer – que ses partisans se placent « à la base » d’une refondation des valeurs individuelles. « On est à la base ! » Ce cri de ralliement militant trahit non un désir de s’élever, mais de s’étendre. Pour penser et pour croire se situer à la base, aux fondements d’une société, il faut cultiver la défiance envers tous ceux qui, de générations en générations, de refondations en défaites, de ruptures en transmissions, ont cru, à bon droit, contribuer à renforcer ses fondations. La base, pour édifier, doit être solide. Si « l’ascenseur social est en panne », comme le veut l’antienne journalistique, il s’agit toutefois dans la société de quelque chose d’autre qu’un ascenseur qui élève : le soin de transmettre en vue d’édifier, le souci de pérenniser des valeurs bonnes, qui favorisent les initiatives et la conservation de l’espèce humaine, qui l’élèvent et qui la renforcent, qui la protègent, en lesquelles elle aime la vie. 

Mais une génération se dresse et proclame : « Nous sommes la base ! » Qu’elle vérifie premièrement que les bases n’ont pas déjà été posées et qu’elles sont encore solides. Parfois, un soutien, une unité de renfort est nécessaire pour consolider une base qui montre quelque signe de faiblesse. Ce n’est là qu’un modeste sacrifice en comparaison des efforts auxquels auront dû consentir des générations pour construire patiemment les bases, les fondations, ce qui fait tenir debout l’édifice. Refonder la base, au contraire, demanderait, avec un aplomb inouï, soit d’aménager un autre emplacement pour construire ailleurs, soit de détruire ou déconstruire l’édifice. Poser de nouvelles bases sur des bases anciennes et encore viables, c’est risquer de faire vaciller les fondations, la structure, l’ensemble, car on ne pose pas des bases sur des bases, des fondations sur des fondations. L’édifice exige de ses ouvriers aussi patients que géniaux la conservation, l’étude et l’élévation.

Mais l’édifice, au fil des siècles de sa construction, a atteint une dimension et une taille prodigieuses. Ses fondations, extrêmement larges et solides, sa hauteur, vertigineuse, font la fierté des individus qui le composent. Non sans vivoter sur les bases anciennes, ils sont grisés par la mémoire de leurs ancêtres, dont ils ressentent le légitime orgueil, et par l’avenir encore prometteur, dont ils pressentent la venue. Il faut le reconnaître, la difficulté, pour eux, ne consiste pas tant à aplanir le terrain, qu’à contempler, sans défaillir, l’horizon majestueux qui s’étend devant eux. L’horizontalité les saisit. La vision qu’il leur reste à inventer n’est pourtant plus si large, plate, géométrique, que haute, profonde, échelonnée, afin de mesurer la difficile beauté de l’édifice. L’heure n’est plus au compas, mais au sextant. Après tout, la grandeur participe de toutes les dimensions. 

La verticalité de l’esprit exprime un désir d’élévation qui succède à l’horizontalité de la volonté, cette volonté déjà ancienne qui a rendu possible la construction de l’édifice. L’horizontalité, qui perdure dans le regard de tous, est l’extériorisation de la volonté commune et mémorable, qui, pour se perpétuer, a l’obligation de se convertir aux profondeurs de la vision, de la création, de l’esprit. À l’heure actuelle, cette profondeur est encore malaisée, mal représentée et difficile à percevoir. Sur nos écrans, il arrive même qu’elle passe ou se fasse passer pour une extravagance folle ou dangereuse, parfois les deux. La restitution de la profondeur impose, à la base de l’éducation, la confiscation ou la mise à distance des écrans, et l’instauration du « temps d’écran » pour tous les autres. Il y a un temps pour tout.

lundi 8 octobre 2018

Où David, isolé, réplique à la leçon mensongère de Roland


Roland Barthes (1915-1980)

« La langue, comme performance de tout langage, n’est ni réactionnaire ni progressiste ; elle est tout simplement fasciste ; car le fascisme, ce n’est pas d'empêcher de dire, c’est d’obliger à dire. »
Leçon inaugurale, Roland Barthes, Collège de France, 1977.


Maintenant, quoi qu’il en soit du contexte de cette phrase et ce qu’elle a pu signifier pour son auteur, ce n’est point la langue qui est fasciste, c’est l’Autre qui est totalitaire. L’Autre, s’il ou elle vous prive de tout présent, de tout espace, de tout avenir, ou de tout partage, de toute parole, peut conduire au sentiment du solipsisme, le sentiment de n’être plus qu’à soi dans un monde fictif, absent. Le fascisme serait une autre chose, un fardeau que l’on n’a pas choisi de porter, que l’on se doit de repousser. Or qu’est-ce qu’une parole, qu’un geste, qu’un acte de présence, de charité et d’amour, sinon tout ce que nous sommes libres de choisir ? Est-on il ou elle, en retranchant sa propre parole du monde, qu’un autre, à soi-même présent, fait exister vaille que vaille ; en lui faisant porter le fardeau du silence qui le ruine ? L’être tout-silencieux serait à bon droit le dieu : tout silence, tout paisible et pacifique, patient et tout à fait « non-fasciste ». Être libre et en paix, ce serait ça, singer Dieu et ne pas lâcher un mot ? Apporter la paix et la liberté ce serait ça, se taire, rester absent, silencieux ? S’il fallait faire face à ce dilemme, préférer être en guerre, plutôt que d’abolir la parole de l’Autre et la mienne, plutôt que de rendre les seules armes que ma nudité me laisse, cela seul serait être un homme, être une femme, sans retrancher sa parole ni du monde, ni de l’autre, car c’est cette parole qui fait le monde pour l’autre. Et lorsque la manne tomba du ciel sur le peuple errant au désert, n’était-ce pas un miracle pour ces affamés ? Et la parole, à l’être qui est privé de l’entendre, de l’écouter, de la sentir, n’est-elle pas un miracle pour cet opprimé lorsqu’elle lui revient, comme un droit, et n’est-ce pas un devoir de s’y efforcer ? Il y a des miracles à la portée de chacun, chacune. Le monde n’a pas de sens sans parole, sans le don de la langue. L’autre, c’est le monde et la vie, c’est le monde vivant qui rappelle à quelqu’un que nous ne sommes rien l’un sans l’autre.

jeudi 16 août 2018

Choix de vie



A — Je construis mon monde comme un château de cartes. Quelqu’un le heurte et il s’effondre. Dois-je le recommencer à lidentique, tout reconstruire méthodiquement, au risque de le perdre à la première rencontre ; ou bien saisir une carte et interpréter mon destin ? Que faire alors, sinon me vouer à la contemplation ? — B — Mais les deux cas ne forment-ils pas qu’une seule perspective ? Le choix est-il distinct entre la reconstruction, pour édifier ; et l’étude, pour renforcer ses fondations ?

mardi 14 août 2018

Honte originelle


Adam et Ève1528, 
Lucas Cranach l’Ancien


A — Pourquoi les femmes que j’aime sont-elles nulles envers moi ? — B — Sans doute ont-elles peur, sans “ll”, de se retrouver nues devant toi ?